Serredor et l'Aile Noire

"Serredor... quelle drôle de guilde de voleurs. Quel ramassis de pouilleux ils étaient. Comment avaient-ils pu en arriver là ?"

Des pensées étranges occupaient l'ancienne Grande Serre, l'une des fondatrices de Serredor. Allongée sur son lit, elle contemplait la plume noire qu'elle avait reçu récemment tout en se demandant ce qui l'avait poussé à agir ainsi. La colère ? L'ambition ? La volonté d'être enfin reconnue ? Celle d'effacer son passé ? Personne à Serredor n'avait compris ce qui était arrivé entre elle et Mallafël. Cette dernière avait gardé le secret sur sa destitution, sans en parler à d'autres. Enfin si, peut être Manack était-il au courant ? Adralya n'en savait trop rien. Elle avait tellement de questions et si peu de réponses. Elle poussa un soupire de lassitude. Ce n'est pas de cette manière qu'elle résoudrait ce mic mac. Elle avait prit sa décision, en son âme et conscience. Maintenant, il fallait qu'elle prouve sa loyauté et pour ça, elle devait s'acquitter de la mission que l'Aile Noire lui avait confiée.

Un bruit la tira de sa torpeur, un sifflement de bouilloire. L'empoisonneuse se releva pour aller regarder où en était sa mixture. Un rapide coup d'œil lui révéla que c'était prêt. En attendant le poison qu'on devait lui amener, elle avait opter pour continuer ses expériences, et ce que contenait la fiole lui serait utile. Surtout contre les Serredors qui allaient immanquablement la traquer.

"S'ils savaient ce qui les attend..." Et elle se mit à sourire à cette pensée.

Elle éteignit le feu sous l'alambic, récupéra la fiole et s'installa à la table, celle sur laquelle elle avait étalé une cinquantaine de flèches dont l'empennage était assez spécial. Au lieu de garder une uniformité dans la couleur, voir de laisser l'originale, une plume sur les trois avait une couleur rouge vif. De cette manière, Adralya repérait facilement les flèches qu'elle devait décocher mais elle devait encore finir de les préparer. Patiemment, elle enduit la pointe de chacune d'elles, avant de les ranger soigneusement dans un carquois posé à ses pieds. Une fois ce dernier rempli par trois familles distincts, normales, rouges et vertes, elle ouvrit une armoire dans laquelle elle rangeait quelques objets. Elle y récupéra sa dague, une drôle d'épée, deux sphères translucides qui détruisaient un enchantement mineur une fois sur quinze, trois paquets de feuilles enroulées comme des cigares avec une mèche qui dépassait et un coquillage ébréché. Elle rangea le tout dans son sac et sortit, prenant soin de verrouiller sa seule planque inconnue de Serredor.

Plus qu'une fiole de poison de la part de Jeste et la chasse au Zervan pourrait commencer.

Bien plus tard, à la nuit tombée, près de Logar, quelques chariots remplis de matières premières arrivaient sur la route. Ils chahutaient leur marchandises heureusement robuste et les passagers. Ellaire, puisqu'elle avait troquée son ancien nom, était satisfaite du résultat. Encore quelques minutes et elle aurait rempli sa mission. Elle devrait passer ensuite à cette enquête.

L'Homme noir, qui pouvait-il être ? Elle avait bien des soupçons, comme Aoife, mais aucune preuve directe. Il faut dire que celui là, il jouait trouble. Entre la rencontre qu'il avait arrangé entre l'Homme noir et Mallafël, sa tentative de dissuasion vis à vis d'Adralya et le piège qu'il avait tendu à cette dernière, on ne savait dans quel camp le mettre. Et puis, il y avait aussi Derdeï, ce conseiller qui "embauchait" l'Aile Noire... Pourquoi confier à un sous fifre le soin de diriger une organisation quand on pouvait le faire soi même dans l'anonymat ? Enfin... ça pouvait être aussi d'autre qu'elle ne soupçonnait pas. Après tout, Adralya avait bien remarqué que le Conseil était un endroit plutôt chaotique avec tellement de personnalités étonnantes et différentes, tout comme les autres organisations criminelles. Bah, il n'était pas l'heure de se creuser la tête, mais celle de vider la cargaison.

Ellaire sauta à bas du chariot, distribua ses ordres discrètement et le déchargement se fit. Quelques bourses changèrent de mains lorsque tout fut livrer et chacun repartit d'où il venait. Maintenant, avec l'aide des hommes que Dix lui avait promis, il était temps de déplacer au bon endroit le tout. Secret, quand tu nous tient...

Tout se déroula sans encombre, Ellaire en fut satisfaite. La suite, ne dépendait plus que d'Adralya, Louvendra, Akunin et la mystérieuse Dix...

L'incendie de l'orphelinat, voilà ce qui avait tout déclenché dans sa tête. Serredor était le seul concurrent encore viable de l'Aile Noire, même si c'était les surestimer, il n'y avait qu'eux pour faire un tel coup. Adralya ne voyait aucun autre suspect, et seul l'Homme Noir avait le pouvoir de donner cet ordre.

Devant les ruines fumantes, la voleuse était prise de rage et de tristesse, de colère et de peine. Les volutes de fumée, voilà tout ce qui restait des gamins qu'elle avait apprécié. Entre les planches fumantes et calcinées, il y avait ce qui restait des corps de tous ces enfants de rues. Même si Mallafël était une pourriture, les former pour qu'un jour ils deviennent le futur de Serredor. Mais cela venait de se terminer. Et pour cet acte, l'Aile Noire allait payer, et le prix fort.

Adralya se détourna de ce triste spectacle, elle devait trouver le capitaine de la Garde de Varanas. Ce fut chose faite assez rapidement. Elle lui déballa tout, tout ce qu'elle savait sur l'Aile Noire, les planques, les noms, les affaires en cours, tout... En échange, elle demanda que l'on remette à zéro les méfaits et que l'on abandonne les charges contre les Serredors, à l'exception d'elle. Si Hoegaarden faisait son travail correctement, personne ne devrait en réchapper; Et les exécutions devraient suivre, au vu des lois que le Conseil envisageait d'adopter... C'était une vengeance tout à fait appropriée pour ces meurtriers d'enfants.

Maintenant, elle n'avait plus qu'à disparaitre dans la nature. Plus rien ne la retenait nul part...

C'est ainsi qu'Ellaire et Adralya s'évanouirent.